Observatoire du Dialogue
et de l'Intelligence Sociale
La raison la meilleure
devient la plus forte
?

5. Mise en perspective

Toutes les cartographies réalisées par l’ODIS depuis 2004, croisant les niveaux de lien social avec ceux de la performance, montrent que, quels que soient les ensembles considérés, ces deux dimensions sont corrélées.

 

Sur toutes les cartographies, on observe que soit les territoires produisent simultanément du lien social et de la performance, soit ils n’arrivent à développer aucun des deux. La corrélation entre Lien social et Performance, démontrée statistiquement dans ce rapport et dans les précédents rapports de l’ODIS, montre ainsi qu’il n’y a pas de réussir ensemble durable sans qualité de vivre ensemble. En miroir et réciproquement, il n’y a pas non plus de cohésion sociale durable au sein d’un groupe social qui ne remporte pas quelques succès collectifs. Les raisonnements politiques, sociaux et économiques ne peuvent plus être « Faut-il générer d’abord du lien social, ou d’abord de la performance ? », mais « Comment faire pour générer les deux simultanément ? ».

Les territoires qui réussissent le mieux, à la fois en termes de lien social et de performance, sont ceux où l’information circule facilement, où le débat public et les échanges de proximité sont plus dynamiques et plus accessibles qu’ailleurs, et où chacun s’implique plus qu’ailleurs dans la construction de l’avenir du collectif. En Europe, ce sont notamment la Suède, les Pays-Bas, le Danemark et l’Autriche.

Les territoires qui réussissent comparativement moins bien à la fois en termes de lien social et de performance sont ceux où des asymétries d’information ne permettent pas à chacun de prendre part de façon égale à la réflexion collective, au partage des diagnostics, à la définition puis à la mise œuvre des projets collectifs. En Europe, ce sont la Grèce, le Portugal, la Roumanie et l’Espagne.

Des exceptions peuvent exister de territoires ou d’organisations dont la performance est élevée malgré un lien social faible. Cela arrive lorsqu’une entité ne se soumet pas aux mêmes règles du jeu que les autres, au sein d’un espace ou d’un secteur d’activité donnés. En France, c’est le cas de l’Ile-de-France qui est la plus performante des régions françaises malgré un lien social limité, en raison d’un « avantage concurrentiel » unique dans le pays de concentration séculaire à Paris de toutes les formes de pouvoirs (économique, politique, social, culturel, etc,..). De façon générale, les espaces ou organismes qui se trouvent en situation de monopole peuvent afficher une surperformance par rapport à leur niveau de lien social, mais ils voient leurs performances chuter lorsqu’ils perdent cet avantage temporaire. Pour éviter cela, la gouvernance doit permettre d’anticiper l’avenir, en associant tous les acteurs, quel que soit leur statut, à la recherche de l’intérêt du collectif. Inversement, les territoires dans lesquels la performance n’est pas au niveau du lien social prennent le risque de voir à terme ce dernier s’aligner sur leur niveau de performance.

Au regard de la corrélation entre lien social et performance, le déséquilibre croissant de l’Union européenne doit être considéré comme une alerte. Trois scénarios sont possibles :

  1. Scénario positif : le lien social va tirer la performance vers le haut. Les performances rattraperaient leur retard.
  2. Scénario négatif : la performance va tirer le lien social vers le bas. Le lien social va cesser de s’améliorer, puis va régresser pour s’aligner sur le niveau de performance.
  3. Scénario responsable : la gouvernance serait repensée pour garantir la réussite du scénario positif, et même le dépasser.

 

[9] ODIS, L’état social de la France et de ses régions, La Documentation française, 2013, p.26.

[10] ODIS, L’état social de la France, La Documentation française, 2010, p.56.

[11] ODIS, Gouvernance, Lien social, Performance : une vision du monde, La Documentation française, 2012, p.22. 

 

L'Europe en chiffres : 

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