<strong>Les modèles
de l'Intelligence Sociale</strong>
Les racines
de la performance durable
?

VIII. L'apogée des sociétésRepérer les six phases apologétiques.

La grille d'analyse de l'apogée des société est la huitième des huit familles de Modèles de l'Intelligence Sociale.

Quelles sont les causes de l’apparition et de la disparition des civilisations ? Comment est-il possible qu’une société s’effondre alors même qu’elle dominait tout ? Comment le cercle vertueux de la croissance se met-il en place, et pourquoi engendre-t-il  progressivement le cercle vicieux de l’affaissement ? Six grandes phases de l’organisation de cette articulation des pouvoirs et des liens entre les acteurs peuvent être discernées.

Les six phases apologétiques sont :

  1. L'enfance
  2. La préadolescence
  3. L’adolescence
  4. L'âge adulte
  5. La vieillesse
  6. La mort

L’évolution des sociétés répond à des règles qui régissent les interactions entre toutes ses composantes. L’économiste mesure la situation actuelle, tandis que le philosophe la met en perspective. L’un analyse les échanges de biens et de services, l’autre cherche les raisons de la circulation des personnes et des idées. Aucune structure de pouvoir ne reste indéfiniment dominante. Chaque entité détient la possibilité, à chaque instant, de prendre en main son avenir à long terme et de s’affranchir du modèle de ses maîtres pour le dépasser. La transformation est constante. Il faut en comprendre les rouages. Il s’agit de distinguer les périodes d’expansion, de croissance et de déclin, et d’en identifier les ressorts sous-jacents et les raisons profondes. Bien sûr, les systèmes d’information sont la clé de la mutualisation des savoirs et des idées, les nouveaux moyens techniques de communication offrant la possibilité à chaque entité d’accélérer la maîtrise de son destin[1]. Nous nous concentrerons ici sur les mécanismes organisationnels qui structurent des tribunes accessibles à tous et qui font appel au meilleur de chacun. La Grille d’analyse des sociétés éclaire autant le citoyen sur son pays, que le salarié sur son entreprise, l’analyste financier sur son investissement, le parieur sportif sur ses champions, ou encore que le géostratège sur le monde.

Qu’en est-il de notre société mondiale dans son ensemble ? L’analyse statistique présentée dans cet ouvrage porte sur un découpage géographique. Or, certes, les 175 pays positionnés n’en sont pas tous au même stade de leur développement. Si les statistiques autorisent une analyse quantitative à court terme, quelles seront les performances de chacun à plus long terme ? Aucune société n’est statique. Pour nous situer encore plus précisément, et afin de tenter de prédire l’avenir d’une société, il convient d’en dessiner la trajectoire, d’identifier son stade d’évolution, et donc de discerner les différentes phases déjà parcourues. Pour cela, un système de lecture précise s’avère nécessaire. Aussi, pour autoriser une perspective historique, nous proposons une grille d’analyse applicable à tous les groupes humains aux contours discernables de façon distincte sur la durée, ancrés dans un territoire, immergés dans un collectif religieux, professionnel, militant, sportif….

Il existe des similitudes entre toutes les sociétés politiques, ethniques ou économiques qui ont dominé leurs concurrents sur un plan commercial, culturel, militaire ou technique, et pendant un temps dépassant la seule présence d’un leader charismatique et celle de ses propres enfants. Elles semblent suivre une trajectoire commune, même si à chaque étape, toute entité doit être considérée au regard des forces et faiblesses intrinsèques de ses concurrents, voire même d’éventuelles catastrophes naturelles. Au départ, leur rayonnement progresse lentement, puis on assiste à une accélération, suivie d’une montée plus rapide qui culmine, jusqu’à dominer et englober tous leurs rivaux immédiats. L’histoire pourrait s’arrêter là, avec l’hégémonie totale d’un acteur. Pourtant, par la suite, advient la stagnation, un tassement progressif du rayonnement, suivi d’une phase d’affaissement plus rapide, puis de l’accentuation de l’impuissance face au déclin qui engendre une spirale fatale jusqu’à la chute. La disparition du système laisse alors la place à un autre, qui se dote d’objectifs, repères et structures neufs.

A chaque phase, si la société parvient à se renouveler de l’intérieur, elle se succède alors à elle-même et poursuit son ascension. En revanche, si elle n’y parvient pas, elle se sclérose et se fait remplacer par une autre, porteuse d’une vision, de valeurs et d’un fonctionnement qui offrent de meilleures perspectives de vivre ensemble et de réussir ensemble. L’histoire peut alors rebondir, mais dans un système renouvelé, qui redistribue les cartes entre tous les acteurs.

Au regard des corrélations entre Lien social, Performance et Gouvernance[2], chaque période de succès et d’extension d’une société est l’effet d’une transformation systémique de la répartition des pouvoirs.

Ces évolutions structurelles sont la source de la cohésion et des réussites du corps social, mais la cause et l’effet sont décalés dans le temps : les transformations de gouvernance modifient le corps social en profondeur, cependant leurs impacts sur la cohésion et la performance ne sont pas immédiatement visibles. S’il n’y a pas synchronie, le tempo reste toutefois le même, toujours impulsé par des acteurs qui se saisissent des marges de manœuvre spécifiques à chaque période.

La Grille d’analyse des sociétés présentée ci-dessous s’applique aussi bien au décryptage de la naissance et de la mort des civilisations, qu’à celui de la montée en puissance et de la chute des chefs d’états et de gouvernements, qu’à celui des succès et des échecs des dirigeants des entreprises, syndicats, associations, voire même d’équipes sportives. Nous illustrons chacune des phases par l’histoire de la Rome antique, dont les raisons de la montée puis de la descente apparaissent clairement entre -509 et 476, soit un millénaire.

 

                         

 

1. Enfance

2.Préadolescence

3. Adolescence

4. Age adulte

5. Vieillesse

6. Mort

Structure : répartition des pouvoirs

Constitution d’une gouvernance équilibrée

Renforcement des contrepouvoirs

Multiplication des lieux de contrepouvoirs et dilution du pouvoir de chacun

Destruction des contrepouvoirs

Unicité du pouvoir / Sursauts structurels

Tressaillements

Soubresauts

Transformation systémique

Dépersonnaliser le pouvoir

Associer les minorités

Associer les vaincus

Recentrer le pouvoir

Associer la force au pouvoir

Réinventer le système

Partage du pouvoir

Maîtriser le clan du chef

Maîtriser le corps social

Maîtriser le pouvoir

Maîtriser les débordements

Maîtriser la sclérose

Maîtriser les scissions

Fonctionnement des dirigeants

Décision collective

Délégation de pouvoirs

Concentration des pouvoirs

Montée de l’impuissance des gouvernants

Despotisme alternatif : sombre / éclairé

Insignifiance

Préalable

Déclencheur Dialectique

Fondateurs Philosophes

Vainqueurs magnanimes

Bridés

Dirigeants centralisateurs

Cyniques

Dirigeants impuissants

Désabusés habiles

Dirigeants despotes

Conservateurs

Dirigeants insignifiants

Décalés

Fonctionnement des dirigés

Envie de participer

Mobilisation pour le projet collectif

Mobilisation pour les projets personnels

Non remise en question.

Départ des personnes et idées innovantes

Dictature introuvable.

Disparition de la capacité de réaction

Refus de soumission

Appel à l’aide extérieure

Culture

Esprit de conquête

Projet collectif

Difficultés d’intégration

Conservatisme

Frilosité

Rejet des règles

Rejet des dirigeants

Performances internes

Bouillonnement des personnes et des idées

L’ascenseur social fonctionne à plein régime

Ralentissement de l’ascenseur social

Ralentissement de la réactivité

Immobilisme

Affaissement

Performances externes

1ères victoires

Conquêtes

Domination

Hégémonique 1ères difficultés

Enchaînement des défaites

Disparition finale

 
 

[1] Le lecteur pourra retrouver le décryptage de ce phénomène dans L’état social de l’Europe, La Documentation française, 2014.

[2] Voir la première partie.

 

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