Organiser le dialogue
 
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L'état social du mondeIV - 3. Construction d'un monde meilleur ou aveugle ?

La montée des expertises dans la matrice citoyenne mondiale permet de construire un monde meilleur.

La prise en charge continue et collective de nombreux nouveaux savoirs forge des valeurs citoyennes de responsabilité intellectuelle et de solidarité universelle. Ainsi, nous entrons dans l’ère des mêmes droits pour chaque homme.

Activer la responsabilité et la solidarité

Le Conseil des droits de l’homme des Nations unies, organe intergouvernemental sur toutes les questions y afférant, a vu le jour en 2006. Succédant à la Commission des droits de l’homme des Nations unies, disparue en raison de blocages politiques, le Conseil a su trouver les mécanismes institutionnels lui permettant de dynamiser le multilatéralisme et de remplir ses fonctions en évitant les impasses qui ont signé l’arrêt de mort de son prédécesseur. Même si les recommandations formulées par le Conseil des Droits de l’Homme n’ont pas de caractère obligatoire, les coûts politiques de leur violation ne sont pas négligeables et limitent les marges des responsables politiques.

Le Règlement sanitaire international conclu en 2005, qui marque un véritable tournant de la sécurité sanitaire mondiale. L’interconnexion du monde l’expose en effet à des risques accrus en matière d’épidémies, d’accidents, de catastrophes naturelles, parmi d’autres urgences sanitaires. Or, il n’y a pas de pays, fût-il riche et « avancé », qui puisse se prémunir tout seul contre de tels risques sans coopérer avec les autres.

Ainsi, le Règlement sanitaire international est devenu un instrument international de première importance, en fournissant aux pays un cadre de collaboration pour « définir les risques et agir pour les endiguer et les combattre », représentant ainsi à la fois « une aspiration collective et une responsabilité mutuelle pour chaque pays ».

L’hyperspécialisation, qui oblige chacun à se focaliser sur des problèmes précis, éloigne du même coup des enjeux globaux et peut produire une perte de sens.

Les mécanismes de gouvernance à caractère représentatif restent imparfaits : ils laissent place à l’instrumentalisation des lieux de décisions par des intérêts particuliers ou privés. La conjugaison de l’apparence de favoritisme et de manque de courage peut atteindre la légitimité des organisations privées, publiques, et même intergouvernementales.

Morcellement des institutions internationales

Décriés pour déficit de transparence et de démocratie, ainsi que par l’échec de certaines de leurs préconisations, le Fonds monétaire international et la Banque mondiale sont mis en cause quant à leur finalité et leurs modes d’intervention. Les instances décisionnelles de ces deux institutions sont dominées par les pays dits « industrialisés » du G7, qui en sont les plus grands contributeurs : ils déterminent les politiques à suivre sans que les pays pauvres ou dits « en développement » puissent être consultés. Or, les échecs récurrents des pays désignés comme les « bons élèves », ainsi que l’insuffisance des indicateurs utilisés pour mesurer la performance des pays, ont fini par entamer leur crédibilité auprès de la population mondiale.

En conséquence, sept pays d’Amérique du Sud ont décidé de créer leur propre fonds de développement, destiné à se substituer à ces institutions, afin de promouvoir un développement régional endogène : la « Banque du Sud » a ainsi commencé à opérer en 2007 dans le but de réduire la dépendance du continent par rapport aux instances financières internationales dominantes. Elle est administrée par un Conseil composé par les ministres de l’Economie des pays membres, qui sont l’Argentine, la Bolivie, le Brésil, l’Equateur, le Paraguay, l’Uruguay et le Venezuela.

Dans le même esprit, les puissances émergentes des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) ont créé en juillet 2 014 une Banque de Développement.

Trois mois plus tard, en octobre 2014, la Chine et vingt autres pays de la région ont signé un protocole visant à établir en Asie une Banque Régionale pour financer les infrastructures, conçue comme un contrepoids à la Banque Mondiale.

 

Pire encore : afficher un projet mondial humaniste tout en œuvrant dans les faits dans le sens de ses propres intérêts particuliers.  S’il ne nuit pas toujours à leur propre part de marché, le décalage entre le dire et le faire de certaines grandes entreprises percute la culture mondiale et promeut le cynisme à grande échelle. Il trace la voix aux désabusés habiles pour travestir leurs ambitions personnelles ou corporatistes sous de nobles déclarations.

Entreprises : des décalages entre valeurs et pratiques

Ainsi Coca-Cola réussit-il à s’allier les faveurs des populations des deux camps ennemis pendant la Seconde Guerre mondiale.

Ainsi, l’entreprise Monsanto se veut-elle une « société consacrée à l’agriculture, dont les innovations et la technologie aident les agriculteurs du monde entier à produire plus en préservant plus » : il s’agit d’« aider les agriculteurs à réussir de manière durable, en produisant une alimentation humaine et animale plus saine […] tout en réduisant l’impact sur notre environnement ». Or, cette même entreprise s’est distinguée par son engagement dans la fabrication de produits toxiques employés massivement lors de conflits armés et ayant eu des conséquences catastrophiques pour l’humanité. Pendant la guerre du Vietnam, Monsanto s’est considérablement enrichie en fabriquant le défoliant connu comme Agent Orange. Plus de trente ans après la fin de ce conflit, ce produit continue de provoquer des ravages au Vietnam, et le nombre d’affectés ne fait qu’augmenter : entre 200 000 et 300 000 seraient victimes de cancers, de malformations congénitales, de handicaps physiques et mentaux résultant des plus de 19 millions de tonnes d’Agent Orange déversées sur de vastes superficies. D’après les dernières estimations épidémiologiques, entre 2,1 et 4,8 millions de Vietnamiens ont été directement exposés à ces agents toxiques contenant de la dioxine, molécule qui, par sa remarquable stabilité, reste présent dans les sols et les sédiments, contaminant ainsi toute la chaîne alimentaire.

Absence de vision globale.

Le souci du court terme entame la responsabilité et la solidarité globales.

Projet collectif : formater le monde pour l’améliorer ou pour l’asservir ?

Le développement et le partage des savoirs s’organise à l’échelle mondiale et titille la conscience planétaire. Une gouvernance universelle a émergé.

Mais l’économie, trame prééminente du projet collectif, ne parvient pas encore à engager les acteurs dans un développement vraiment durable.

 

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